Une réussite sans compromis pour le premier album de Romare

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Séance de rattrapage autant que départ en fanfare, Projections est le 4ème disque de Romare, et son deuxième sur le prestigieux label Ninja Tune. Pour le jeune anglais, à l’origine poulain du label bristolien Black Acre (qui compte aussi Hyetal, Blue Daisy ou encore Fantastic Mr. Fox), ce premier full-length est l’occasion de faire découvrir sa patte si particulière à une nouvelle audience, en longueur et en profondeur, avec amour et dévotion. Un exercice réussi, dont le compte rendu se situe ici-bas.

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L’ouverture se fait en douceur, à commencer par l’énigmatique Nina’s Child: quelques samples de voix, une ligne mélodique simple et chaude, jetés sur une rythmique enfantine pour un résultat brillant de simplicité. Puis sans perdre une seconde, l’anglais sors le grand jeu avec Work Song; un hymne en devenir, époustouflant de majesté et de groove, dont les sonorités acoustiques se détachent de la masse avec l’aisance déconcertante que l’on connaît à Romare. Viennent ensuite la complainte de Motherless Child et le très house Roots, déjà édités en single sur Ninja Tune à la fin de l’année passée et sur lesquels nous ne reviendrons donc pas, intercalés de l’étonnant Ray’s Foot, dont les sonorités discordantes de prime abord apprivoisent l’oreille pour ne plus la lâcher.

On poursuit l’écoute avec Jimmy’s Lament, qui offre une relative accalmie pour mieux saisir l’auditeur par les sentiments, signe d’un placement mûrement réfléchi, et vrai plaisir pour nous avant le regain d’énergie de Lover Man. En moins de 3 minutes, et dans une ambiance hip-hop orchestrale digne d’un Kid Koala des grands jours:

Romare crée un véritable univers à part, autant à sa place dans les recoins sombres d’une soirée anglaise d’aujourd’hui que dans l’imaginaire détraqué des jazzmen d’hier.

Pour continuer les comparaisons flatteuses, on peut saisir dans le prochain morceau Rainbow les influences de Four Tet, une house douce et trippy, acoustique, légère, sans retenue. Il est donc tout naturel qu’on opère un retour aussi radical avec Prison Blues qui, tout en restant dans une rythmique house, dégage un parfum plus amer. Le travail soigné de filtrage dévoile une mélodie des plus deep, hantée par le fantôme de Rick Wade pour un morceau adapté aux voyages au bout de la nuit, une leçon par l’exemple en matière d’atmosphère.

Seule déception de l’album (et qui reste matière à débat), The Drifter est néanmoins le fruit d’un processus évident de recherche pour Romare, et est de loin la pièce la plus “acoustique” de l’ensemble, évoquant autant une vieille chanson country transmise à travers les âges que les premiers disques de Gorillaz. Enfin, l’album touche à sa fin avec les sept minutes de La Petite Mort, analogie judicieuse tant par la place du morceau dans l’album que par celle qu’il occupe dans nos coeurs. Sensations d’extase et stase temporelle à prévoir, une redescente vers le calme plutôt qu’un culmination, qui laisse néanmoins sans voix. Après ce (quasi) sans-fautes, on à hâte de voir ce que Romare à en stock pour l’année qui vient.

Autres écoutes essentielles: ses disques sur Black Acre, que certains d’entre vous reconnaîtront certainement.

L’album de Romare est sorti depuis le 23 Février, est est disponible en vinyle, CD et digital chez les fournisseurs habituels.

Écrit par Sébastien.