Pour cette nouvelle MIXED BY, Bowly sort de sa frénésie disco pour une petite virée house bien sympathique. C’est en cherchant quelques classiques dans sa collection de vinyles, que Bowly nous a livré quelques trésors.
Talentueux producteur et DJ sans prétention, Bowly arpente la scène montréalaise depuis une quinzaine d’années. On l’a d’ailleurs retrouvé en 2015 pour 2 live à Mutek et Never Apart et précédemment aux côtés de Anthony Shake Shakir, D’Marc Cantu, DJ Qu, Project Pablo, etc. “Mélange énergique de rythmes syncopés, exaltantes mélodies et tonalités graves”, Bowly sait faire danser les afters et contenter les mélomanes. Olivier, aka Bowly, c’est aussi un artiste passionné qui explore plusieurs univers musicaux grâce à ses différents alias : OJPB, DÐD, MTSP.
On a donc voulu en savoir un peu plus sur celui qui se cache derrière ses nombreux alias, ses projets à venir, la sortie de son dernier EP sur Parages et ses gears. Retour sur un captivant mardi après-midi en studio.
[soundcloud url=”https://soundcloud.com/boltingbits/bowly” /]
INTERVIEW
Au cours de ces dernières années tu as signé chez Berkane Sol en 2010, sur le label montréalais Fur Trade en 2013 et dernièrement en 2015 avec Parages music + une multitude de unreleased. Si tu devais piquer l’attention de nos lecteurs sur ton travail, quelles seraient les 3 productions que tu mettrais en avant ?
On va y aller avec une ancienne, une récente et une future alors.
Pour l’ancienne : DÐD – Siula Grande qui est sortie sur Fur Trade en 2013. C’est la première enregistrée intégralement sur du hardware, one take, live jam. Je l’ai juste éditée par la suite.
Pour la récente : OJPB – Pénétrante qui vient de sortir sur Parages fin 2015. En fait, elle date un peu (je l’ai terminée il y a 2 ans). C’est la première track que j’ai fait sur le MPC (qui est devenu ma machine de prédilection depuis).
Pour la future :OJPB – Make Me Blue – Elle n’est pas encore sortie mais c’est vraiment une de mes armes secrètes. C’est un track fait super rapidement la veille d’une gig histoire d’avoir quelque chose de nouveau à jouer, 2 heures sur le MPC. C’est loin d’être raffiné (pour ne pas dire que c’est même franchement rough).
Comment pourrais-tu décrire ta musique ? Quelles sont tes influences majeures ?
C’est toujours difficile de répondre à cette question. Je touche à beaucoup de choses et de styles… disons que j’essaie toujours de faire quelque chose qui m’émeut, qui me donne envie de bouger (au sens propre comme figuré) en espérant que ça aura le même effet sur les gens qui vont entendre ma musique. Au-delà de ces généralités, j’aurais beaucoup de mal à faire une synthèse de « mon style ». J’ai toujours du mal à catégoriser chacune de mes pièces alors pour ce qui est de ma musique en général… mission impossible haha. Je pense que c’est plus le boulot d’un critique.
Pour ce qui est de mes influences, encore un fois c’est très difficile à résumer. Une chose est sûre c’est que je m’intéresse toujours beaucoup aux racines des styles de musique qui m’obsèdent. Tout ce que je joue comme DJ ou ce que je fais à une grande partie de ses origines dans la musique afro-américaine : Blues, Jazz, Soul, R’n’B, Funk, Disco. Donc on peut dire que c’est une énorme partie de mes influences. Mais il y a tellement d’autre genres… la musique électronique au sens large, la pop sous quasiment toutes ces formes (et de toutes origines), beaucoup de musiques contemporaines, classiques, traditionnelles…
En tant que digger aguerri, quel est le vinyle dont tu ne te séparerais pour rien au monde ; et le plus insolite que tu as jamais entendu?
Je ne pense pas vraiment être un digger aguerri, j’en connais plein et je n’oserais pas me comparer à eux. Je ne suis pas non plus un collectionneur, ni un spéculateur, si je n’écoute pas un disque ou que je ne le joue pas, il va partir pour faire de la place à quelque chose d’autre.
Cela-dit, il n’y a pas UN vinyle dont je ne me séparerais pour rien au monde… il y’en a plein!! Un d’entre eux c’est Donny Hathaway – Extension Of A Man. Rien que pour la moitié de la première face (I Love the lord; He Heard My Cry (Part I & II) et Someday We’ll All Be Free) ce disque est indispensable, sans compter que le reste de l’album est absolument fabuleux. C’est un des disques les plus émouvants que je connaisse… et le reste de sa discographie ne l’est pas moins (He Ain’t Heavy, He’s My Brother est un autre pièces totalement incroyable)
Tu commences maintenant à collectionner plusieurs alias : DÐD, MTSP, OJPB, Bowly. Pourrais-tu nous les introduire et nous en dire un peu plus sur leur univers ?
DÐD : c’est mon côté plus dark, techno, four on the floor.
MTSP : C’est le pendant plus electro de DÐD
OJPB : C’est mon alias pour tout ce qui est plus house, soulful, oldschool.
Bowly : C’est mon premier nom de production et DJ. Je ne m’en sers plus que pour les gigs de DJ aujourd’hui.
On a été impressionné par ton dernier Live à Mutek l’année dernière avec la toute première d’OJPB. Comment as-tu vécu ce moment spécial derrière toutes tes machines ? Le prochain live c’est pour bientôt ?
Je l’ai vécu avec énormément de stress hahaha. Je ne sais pas combien de kilos j’ai perdu avant et pendant ce show mais disons que j’ai du retrouver mon poids santé. J’en suis très content, c’était une belle expérience, ça m’a obligé à composer des tonnes de matériel (tout est inédit dans le live). J’ai refait un live depuis pour Never Apart, ça s’est bien passé aussi. Pour ce qui est de continuer à jouer live je ne pense pas le faire avant un bon moment. L’impact de littéralement détruire mon studio sur ma productivité est vraiment trop important pour que je fasse ça souvent. En fait il faut que je trouve une solution (sans doute acheter certaines machines spécialement pour le live) pour que ce soit plus simple à ce niveau là… et de toutes façons je ne pourrais pas me déplacer à l’extérieur de Montréal avec une telle quantité d’équipement.
À quoi ressemble ton studio aujourd’hui ? Es-tu plus porté sur le hardware ou le software ou un mix des deux ?
Mon studio (aujourd’hui et à peu prêt tous les jours) ressemble à un gros bordel de vinyles, platines et machines en tout genre.
J’ai commencé à produire avec du hardware depuis 5 ou 6 ans, en accumulant pas mal de synthés, effets, mixers, séquenceurs, samplers, etc. au fil des années. Le turning point a été l’achat du MPC 2000xl qui est devenu le cerveau de mon studio. Il séquence la plupart (quand ce n’est pas absolument tous) les instruments/samplers du studio via midi. Je me suis acheté un nouvel ordinateur y’a pas trop longtemps donc j’ai recommencé à faire du multi-tracking sur Ableton dernièrement, mais ça reste assez oldschool comme manière de travailler.
On s’est récemment procurés ton dernier vinyle sur Parage music, que l’on a d’ailleurs adoré, “Bowly presents OJPB”. Qu’elle était l’idée derrière cet EP, amorces-tu petit à petit la transition Bowly vers ton nouveau projet OJPB ou reste t’il un autre side project que tu mènes parallèlement ?
Merci ! Les gars de Parages (Jonattan Levingstone, Menjai et Ludaxpack) sont de très bons amis et d’incroyables DJs. Ça faisait des années que je leur envoyais mes tracks, quand ils ont lancé le label on a mis quelques temps à trouver celles qui allaient bien marcher ensemble pour faire un EP cohérent, mais on y est finalement arrivé, avec un remix incroyable de Simoncino pour courroner le tout. La transition vers OJPB est amorcée depuis 3 ans en fait. C’est devenu mon alias principal pour ce qui est de la production, c’est avec ce projet que j’ai produit le plus de tracks et d’edit.
Il est possible que je refasse des choses sous mes autres noms, mais pour l’instant OJPB est la priorité.
Ça fait un certain temps que tu arpentes les soirées montréalaises. Selon toi, quelles ont été les grandes évolutions de cette scène ces dernières années ?
En fait ça fait bientôt 15 ans que je les arpente comme danseur. À Montréal, comme à peu prêt partout, la scène club est façonnée en grande partie par les 18-35 ans, comme nous vivons dans une ville universitaire les cycles de changement sont assez rapides, c’est vraiment dur à analyser. Une tendance de fond par contre est celle de l’agrandissement du public avec des effets bénéfiques (plus de diversités dans les soirées) et d’autres moins (commercialisation à outrances et volonté de cash-in au mépris de la qualité musicale ou de la vibe dans certains cas).
On imagine que tu as du entendre un bon nombre de DJset et live. Pourrais-tu nous partager quelques moments forts qui t’ont particulièrement marqué.
Il y’en a de nombreux en effet. Je pense que la plus grosse claque que j’ai eue dernièrement a été de revoir Hunee deux fois en un weekend (big up Morning Fever, NVA et Arbutus). Ce mec est un monstre derrière les platines. Anthony Shake Shakir, Sadar Bahar, Eddie C., Eamon Arkin m’ont aussi époustouflés cette année. Niveau live, D’Marc Cantu en solo et avec 2AM/FM sont dans mes favoris à vie, Iron Galaxy, Project Pablo, Khotin sont les autres qui m’ont énormément impressionnés niveau live dans la dernière année. Sur le plus long terme il y a eu le live mémorable de Interstellar Fugitives (UR) à Mutek en 2008 avec Heart & Soul en première partie.
Sur le plan créatif, comment l’énergie de Montréal a influencé ton travail ?
C’est assez difficile à dire, mais je crois qu’il y a un sentiment de liberté et d’utopie qui est toujours assez présent dans cette ville. La communauté des artistes est assez petite donc on n’est pas trop poussé à rester dans sa « niche » stylistique sans se soucier de ce que fait son voisin dans un domaine complètement différent. Mais je dirais que c’est les gens que j’ai rencontré, les amis proches et moins proches qui m’ont fait découvrir toute sortes de choses (musicales ou autres) qui m’ont influencés.
On a appris que tu partais bientôt pour quelques semaines en Europe. As-tu prévu quelques dates ?
Oui, c’est les gars de Parages qui travaillent fort à finaliser les dates. On devrait jouer à Berlin, Paris et Bordeaux.
Et enfin, quel est ton programme pour 2016 ? On a entendu des rumeurs sur un prochain EP qui devrait sortir en fin d’année …
Produire encore plus, sortir plus de disques, jouer plus souvent… pareil que 2015 et que les autres précédentes. Mais plus concrètement on prépare un deuxième EP sur Parages et un autre également sur un nouveau label associé au meilleur club en ville (à mon humble avis) Le Bleury – Bar à vinyle.
Photo et interview Sarah-Marie